Bail commercial : Une liberté contractuelle plus grande que ce qui était initialement prévu par le projet de loi.

La loi du 3 février 2018 portant sur le bail commercial et modifiant certaines dispositions du Code civil (ci-après « la Loi ») vient modifier de manière significative certains aspects du statut des baux commerciaux et il est donc nécessaire d’en retenir les points-clefs.

(i) Champ d’application : baux d’un immeuble destiné à l’exercice d’une activité commerciale, industrielle ou artisanale. Bien que le texte de loi ne le précise pas expressément, tombent dans le champ d’application de la Loi les baux dans les centres commerciaux, les stations de service, etc. Sont exclus du champ d’application les baux d’une durée inférieure ou égale à une année, de même que les baux de bureaux.

(ii) Durée : les parties restent libres de conclure des baux, soit à durée indéterminée, soit à durée déterminée. À défaut d’indication, le bail est conclu à durée indéterminée.

(iii) Délai de résiliation : minimum 6 mois et il devra être notifié par lettre recommandée avec avis de réception, sauf résiliation judicaire pour faute du preneur.

(iv) Garantie locative : le preneur peut opter pour une des trois formes de garantie (garantie bancaire à première demande, souscription d’une assurance ou toute autre garantie, notamment le versement de 6 mois de loyers sur le compte du bailleur) mais elle est limitée à 6 mois de loyer.

(v) « Pas de porte » : l’un des principaux apports de la Loi concerne l’officialisation du principe de l’interdiction de tout supplément de loyer payé, soit au bailleur, soit à l’intermédiaire.

(vi) Renouvellement : droit du preneur ou du sous-locataire d’obtenir le renouvellement du bail à durée déterminée pendant 9 ans. Or, si le principe du droit au renouvellement est acquis au preneur, encore faut-il que celui-ci soit très vigilant sur les modalités de sa mise en œuvre et formuler la demande au moins 6 mois avant l’expiration du bail. De même, le bail à durée déterminée est renouvelé par tacite reconduction, sauf si le bailleur a résilié le contrat dans les délais. Après 9 ans, le bailleur peut refuser le renouvellement à condition de payer une indemnité d’éviction ou de demander au repreneur de la payer.

(vii) Motifs de refus de renouvellement : 4 tempéraments au principe du renouvellement sont prévus : la faute dans le chef du preneur, l’occupation personnelle par le bailleur ou ses descendants, l’abandon de toute location aux fins d’activité semblable et la reconstruction ou transformation.

(viii) Sous-location : toutes cessions et sous-locations devront être notifiées avec une copie intégrale du contrat de cession au bailleur, lequel pourra refuser, mais uniquement pour de justes motifs, dans les 30 jours de la notification du projet. En cas de refus, le preneur devra saisir le juge de paix dans les 8 jours. Autre nouveauté pour protéger le bailleur de toute finalité spéculative, il est interdit de sous-louer à un prix supérieur au loyer principal, sauf si des investissements spécifiques à l’activité de sous-location sont réalisés par le preneur. Cette interdiction prendra effet 12 mois après l’entrée en vigueur de la Loi.

(ix) Indemnité d’éviction : les parties déterminent librement le montant en insérant dans le contrat de bail, soit un montant, soit une clause fixant les critères de calcul. Faute de stipulation dans le contrat, le juge de paix fixera le montant sur base de la valeur du fonds pour l’activité. L’indemnité d’éviction est due en cas de résiliation ou de refus de renouvellement du bail par le bailleur au terme d’une durée d’au moins 9 années d’occupation des lieux. Cette indemnité peut être versée au preneur par le bailleur ou par un tiers.

(x) Sursis : sursis unique d’une durée maximale de 9 mois sans prorogation ni appel possible, aux conditions cumulatives suivantes : tous les loyers et avances sur charges doivent être réglés au jour de l’introduction de la demande et le sursis est uniquement accordé pour permettre au preneur de trouver un autre immeuble en vue de poursuivre son activité et répondre à ses obligations résultant du Code du travail.

(xi) Droit de préemption : à l’instar des baux d’habitation, la loi accorde au preneur de longue durée (au moins 18 ans) un droit de priorité en cas de vente de l’immeuble.

(xii) Applications des dispositions de la Loi aux contrats existants : le principe de la nullité du « pas de porte » ne s’applique pas aux contrats existants dont l’entrée en jouissance pour le preneur est fixée avant l’entrée en vigueur de la Loi.

La Loi entrera en vigueur le 1er mars 2018.