Covid-19 – Bail commercial – Théorie des risques – 26 janvier 2021

Deux jugements intéressants[1], les premiers à notre connaissance, viennent d’être rendus en matière de bail commercial.

Dans la première affaire, un cafetier ne s’est pas acquitté de ses loyers et le propriétaire l’a poursuivi en justice. À titre reconventionnel, le locataire a demandé la réduction du loyer pour la période de fermeture décidée par le gouvernement, sur base de la théorie des risques.

La deuxième affaire est similaire, sauf qu’il s’agit d’un commerce de vente de vêtements. Dans cette affaire, le propriétaire a néanmoins opposé au locataire le fait qu’il aurait pu modifier son modèle d’exploitation de son commerce en instaurant des ventes en ligne ou « Click & Collect ».

Le Tribunal a retenu dans les deux cas que le bail est un droit personnel, en d’autres termes que le locataire obtient ses droits par le bailleur et celui-ci doit garantir au locataire la jouissance tant matérielle que juridique de ses locaux.

Le Tribunal a rappelé que le contrat de bail est un contrat synallagmatique, c’est-à-dire qui comporte des obligations réciproques, à savoir le bailleur doit garantir une jouissance conforme à la destination du bail et le locataire doit payer ses loyers à échéance.

Le Tribunal a donc retenu que si le bailleur ne peut plus garantir cette jouissance, même pour une raison qui lui est étrangère, en l’espèce en raison de la législation au titre des mesures de lutte contre le COVID-19 interdisant l’accueil au public, le locataire est libéré du paiement de ses loyers pour cette période.

En fait, le Tribunal a appliqué la théorie des risques, résultant de l’article 1722 du Code civil, laquelle vise notamment la perte juridique et met les risques de la perte du bien loué à la charge du bailleur.

Il a encore été décidé que le locataire n’est pas tenu d’avoir recours à un mode d’exploitation alternatif de son commerce ; la jouissance des lieux doit être conforme à la destination prévue par les parties, ce qui suppose un accueil du public dans les lieux.

En conséquence de quoi, le Tribunal a fait droit à la demande en réduction du loyer demandée par le preneur – cafetier (en raison du fait que ce dernier a demandé une réduction et non une libération de ses loyers) et il a libéré entièrement le preneur – vendeur pour les périodes de fermeture obligatoire.

Au-delà du simple cas d’espèce, cela signifie que les locataires peuvent, sous la condition qu’ils ont été obligés de fermer leur commerce et qu’aucune clause d’exclusion n’est prévue au contrat de bail, faire valoir une réduction de loyer et/ou même être déliés de l’obligation de paiement du loyer.

Il est précisé que ces jugements ont été rendus en 1ère instance et qu’ils ne sont pas, à ce jour, coulés en force de chose jugée.


[1] Jugements du 13 janvier 2021 n°94/21 et du 14 janvier 2021 n°124/21