Revirement de jurisprudence.
Un arrêt de la Cour d’appel du 28 novembre 2024 impose une vigilance accrue sur les termes des contrats de réservation en VEFA. Ce revirement de jurisprudence pourrait avoir des conséquences importantes pour les promoteurs.
Rappel du cadre légal
L’article 1601-13, alinéa 1er du Code civil autorise les ventes en l’état futur d’achèvement (VEFA) ou à terme à être précédées d’un contrat préliminaire. Ce contrat, encadré strictement, doit inclure un dépôt de garantie sur un compte spécial ouvert au nom du réservataire. Toute convention qui s’écarterait de ce cadre est nulle.
L’arrêt du 28 novembre 2024 : une requalification inattendue
Dans cette affaire, la Cour a jugé qu’un contrat de réservation qui incluait une obligation ferme pour l’acquéreur d’acheter, sous peine de clause pénale, ne pouvait être qualifié de contrat préliminaire au sens de l’article 1601-13 du Code civil.
En l’espèce, le contrat stipulait que le réservataire déclarait acquérir le bien moyennant un prix déterminé et révisable. Les parties avaient également convenu des conditions suspensives et une clause pénale de 10% du prix de vente.
La Cour en a conclu que les parties avaient convenu de la chose et du prix, mais également de l’obligation pour le réservataire d’acquérir le bien moyennant paiement du prix. La Cour a interprété l’insertion dans le contrat de clauses suspensives et d’une clause pénale comme la manifestation de l’intention des parties de prendre un engagement ferme de vendre, respectivement d’acquérir le bien.
La Cour est ainsi arrivée à la conclusion que le contrat était à qualifier de promesse synallagmatique de vendre, qui est en principe nulle dans son intégralité aux vœux des dispositions de l’article 1601-13 du Code civil. Toutefois, s’agissant d’une nullité relative dont seul l’acquéreur peut se prévaloir[1], la nullité n’a pas été prononcée car l’acquéreur avait demandé l’exécution du contrat, limitant par-là l’impact de la requalification.
Une rupture avec la jurisprudence antérieure
Cet arrêt constitue un revirement de jurisprudence en ce que, par plusieurs décisions antérieures[2], la Cour avait toujours considéré que le dépôt de garantie n’était pas obligatoire, les dispositions de l’article 1601-13 du Code civil étant conçues dans un esprit de protection du bénéficiaire de la réservation, de sorte que le réservant était donc libre d’y renoncer.
Le Tribunal avait précédemment retenu que le contrat préliminaire prévoyant une clause pénale n’est pas à annuler dans son intégralité, mais que seule la clause pénale est réputée non écrite[3].
Conseils pratiques pour sécuriser vos contrats de réservation
Pour éviter la nullité des contrats de réservation en VEFA, il est crucial de :
En cas de non-respect de ces précautions, le réservataire pourrait refuser d’acheter sans perdre le dépôt de garantie, même si aucune différence anormale avec les prévisions du contrat n’est constatée.
[1] Cour de cassation, 19 avril 2012, Pas. 36, p. 93.
[2] CA, 4ème chambre 9 décembre 2009 no 33501 du rôle, TA Diekirch 19 mars 2019 no 22392 du rôle.
[3] TA Diekirch, 17 octobre 2017, jugement civil 147/2012 no 19572 du rôle.